Un bon jour
Avec le jour qui se lève, vous avez sans doute avalé un petit déjeuner, bu un café bien chaud, mangé une tranche de tresse, un fruit. Mais avez-vous pensé à remettre à Dieu cette nourriture et cette journée ? «Bénir le repas, c’est rapporter ce que nous mangeons à Dieu qui en est la source et qui s’offre lui-même au travers de ce qu’il nous offre.» (1)
Que la grâce et la paix vous soient données de la part de Dieu qui prend soin de nous.
Ce matin, je vous emmène dans mon frigo…
Au moment où nous sommes contraints de rester à la maison, la tentation de grignoter est très forte. Les pauses-café avec mon mari et les repas familiaux rythment les journées ; nos rares sorties sont destinées à réapprovisionner le placard et le frigidaire, ce qui nous permet de cuisiner de bons petits plats, suisses, belges ou camerounais.
Sachant que l’homme (et donc la femme) ne vivra pas de pain seulement, je dévore aussi des livres. Et sans le vouloir, je me suis aperçue que la plupart ont un rapport à la nourriture : «La Haggadah du repas de la Pâque», «Esprit divin, esprit du vin», «Se goûter Un en Dieu», «Manger, une voie spirituelle»…
Je souhaite vous en faire déguster quelques tranches des plus savoureuses. Alors suivez-moi.
Prière
Seigneur, Dieu des affamés et des gloutons, Tu nous donnes le pain quotidien.
Parce que Tu es la Source, Tu nous promets une vie en abondance.
Que cette journée qui commence te soit, en premier lieu, consacrée. Qu’en prenant notre petit déjeûner, nous te remettions celles et ceux qui nous nourrissent et celles et ceux qui galèrent chaque jour pour trouver leur pitance.
Ouvre nos bouches pour que ta parole descende jusqu’au coeur. Elle est nourriture céleste qui donne la joie, voie étroite vers le bonheur. Amen
Un temps de relaxation
Prendre un temps pour Dieu demande une préparation, tout comme pour la cuisine.
Loin du stress quotidien, je me pose un instant, là où je me sens bien.
Pour ma part, ce sera sur mon tapis de gym. Je prépare également un miroir.
Sur la musique D’Anton Dvorak, Le calme de la forêt,
je me laisse aller.
Dans un premier temps, j’inspire, je retiens le souffle, puis j’expire. Je prends conscience de ce qui entre dans mon corps, du parcours de l’air et de ce qui en ressort. (Une dizaine de fois).
Dans un deuxième temps, je me place devant le miroir. J’observe cette silhouette. Je décris ce que je vois, est-ce que cela me plaît ? Je dis ce que je ressens.
Pour terminer, je fais l’effort d’éprouver de la tendresse pour la personne que je vois.
Je loue le Seigneur parce que je suis une créature merveilleuse.
Un petit tour dans la Bible
Nous voilà ouvert-e-s, prêt-e-s à écouter et à savourer ta parole,Seigneur
Ezechiel 2, 8 à 3, 3
La parole du Seigneur me fut adressée: «Fils d’homme, écoute ce que je te dis. Ne sois pas rebelle comme cette engeance de rebelles ; ouvre la bouche, et mange ce que je te donne». Je regardai : une main était tendue vers moi, tenant un livre enroulé. Elle le déploya devant moi ; il était écrit au-dedans et au-dehors, il contenait des plaintes, des lamentations et des cris.
3, 1 : Le Seigneur me dit : «Fils d’homme, mange ce qui est devant toi, mange ce rouleau, et va parler à la maison d’Israël». J’ouvris la bouche, il me fit manger le rouleau et il me dit : «Fils d’homme, remplis ton ventre, rassasie tes entrailles avec ce rouleau que je te donne.» Je le mangeai donc, et dans ma bouche il fut d’une douceur de miel.
Trad. TOB
Message
«On devient ce que l’on mange» dit-on.
Certains parmi les paroissiens me connaissent bien : j’aime passer du temps à table et ça se voit.
Mes joues sont rouges, mes courbes généreuses et on dit de moi que je suis une «bonne vivante».
Une bonne vivante ! Mais qu’est-ce que c’est exactement ?
Selon Wiktionary, «un bon vivant» est une personne d’humeur joviale qui apprécie les plaisirs de la vie, notamment les plaisirs de la table. Le bon vivant est rarement maigre.
Est-ce à dire que le bon vivant passerait son temps à assouvir son besoin de se remplir l’ estomac ? Je ne me retrouve pas vraiment dans cette définition.
Saviez-vous que Jésus aussi a été victime de ce genre de quolibet. C’est l’évangéliste Luc au chapitre 7, 34 qui rapporte le fait : «Vous dites : «Voyez cet homme qui ne pense qu’à manger et à boire du vin…»
Alors je souris et j’imagine à quoi, ou à qui, ces personnes qui me voient comme une bonne vivante me comparent.
Autrefois, la gourmandise était considérée comme un péché. Actuellement, on parle plutôt de boulimie, du besoin insatiable de consommer. Le bon vivant, ainsi possédé par le démon du ventre, a-il peur de manquer de tout ? Quel rapport entretient-il avec la nourriture ? La peur de manquer, c’est elle qui empêche d’atteindre l’essentiel. (2)
Ce démon-là, Jésus le connaît bien. C’est lui qui l’a tourmenté au désert dans un moment où il est en communion intime avec la Source.
Alors qu’il a faim, une petite voix intérieure s’inquiète pour sa survie : «Si tu es le fils de Dieu, ordonne à cette pierre de devenir du pain» (Luc 4, 2).
Je dois bien l’avouer, la période de confinement a pour effet de passer beaucoup de temps à me regarder dans le miroir. Non pas que je sois narcissique : je m’observe et je m’analyse. Je me recentre sur moi, sur mon image, et je me pose des questions quant à ma santé physique et spirituelle.
Il y a quelques semaines, un stupide accident m’a contrainte à faire quelques séances de physio, ce qui a précipité ma prise de conscience : le temps est venu de «me goûter» autrement.
C’est donc en relisant le livre de Philippe Baud «Manger, une voie spirituelle» que je réapprends à manger positif, à mastiquer les aliments, dans une démarche holistique. Si je donne à mon corps (et à mon esprit) une nourriture heureuse, il devient heureux.
Le prophète Ezechiel m’y emmène, lui qui fait l’expérience de la manducation de la parole : «Ouvre ta bouche toute grande!», non pas pour parler mais s’en nourrir lui-même.
Au travers de l’ épreuve, emplie de deuils, de plaintes, de chagrins, de solitude aussi, Dieu nous encourage à manger sa parole, à la méditer, à prier, à chanter sa louange, pour nous faire du bien.
– Permettez-moi un aparté pour témoigner de ma reconnaissance envers un ami qui chaque vendredi soir, depuis le 14 mars, organise des soirées vidéo de louange, depuis son salon. C’est un vrai moment de communion fraternelle –
Dans sa réponse à la voix au désert, Jésus invite l’humain à ne pas vivre que de pain seulement… mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu (Deutéronome 8 : 3).
- Pas de distanciation sociale avec Dieu, tu ouvres la bouche et tu manges ce qui sort de sa bouche.
Par la lecture régulière de la Bible, j’apprends à mâcher, à goûter, comme le psalmiste m’y invite au psaume 34, 9 «Goûtez vous-même et voyez combien le Seigneur est bon».
Le prophète Ezechiel avale «le rouleau rempli de gémissements et de tristesse, ce qui, à priori est tout sauf délicieux, et pourtant celui-ci a un goût de miel». C’est la saveur de l’espérance en des jours meilleurs. (3)
Cher-e-s ami-e-s, aujourd’hui, nous sommes invité-e-s à réconciler le matériel et le spirituel en une bouchée de pain. Jésus est la Parole et la Parole est Dieu (Jean 1, 1). Prenez et mangez lentement, mâchez, savourez, ceci est son corps.
Amen
Photo Christine Phébade Yana Bekima
Chanson de Kadja Nin, pour laisser éclater sa joie et danser
Bénédiction
Source de toute vie, bénis-nous abondamment
Ta Parole nourrissante est espérance et guérison
Ton amour pour nous est sans limite
Nous sommes bénis, Toi qui nous as tissés dans le secret des entrailles de notre mère
Nourris, bénis, guéris. Amen
Christine Phébade Yana Bekima
Bibliographie
(1) Manger, une expérience du sacré, Michel Max Egger, tiré de Manger, une voie spirituelle, La Chair et le Souffle, Novalis, p.29
(2) Se goûter Un en Dieu, Nils Phildius, p.128
(3) Mange le rouleau du livre, Thérèse Glardon, tiré de Manger, une voie spirituelle,17
– Se goûter Un en Dieu, Nils Phildius, Ed. Labor et Fides, Genève, 2020
– Manger, une voie spirituelle, Philippe Baud, La Chair et le Souffle, Ed, Novalis, Labor et Fides, Montréal, 2013
Ces livres sont disponibles au COD.